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Documentation

Commission fédérale des migrations | Pour une meilleure protection des enfants à l’aide d’urgence

Commission fédérale des migrations (CFM)

Pour la première fois en 20 ans, les conditions de vie des mineur·es et adolescent·es au bénéfice de l’aide d’urgence dans le domaine de l’asile font l’objet d’une étude systématique d’envergue nationale. Sur mandat de Commission fédérale des migrations (CFM), l’étude du Marie Meierhof Institut für das Kind (MMI) alerte sur les graves atteintes à la santé – notamment mentale – et au développement qu’endurent les enfants hébergé·es dans des structures d’aide d’urgence. En complément, les conclusions de l’enquête sont qualifiées juridiquement dans un avis de droit rédigé par l’Université de Neuchâtel. Pour la CFM, des mesures politiques doivent être prises pour préserver les droits fondamentaux des enfants et adolescent·es. Et ce peu importe leur statut de séjour.

Copyright CFM, artiste Ceciala Bozzoli

Ci-dessous, nous relayons le communiqué de presse de la Commission fédérale aux migrations. Nous vous renvoyons également vers le rapport du Marie Meierhof Institut – auteur du rapport – et l’avis de droit précédemment mentionnés.

  • Envoi de questions: Bettina Looser, directrice, Commission fédérale des migrations CFM, bettina.looser@ekm.admin.ch

Rapport de la CFM

Berne, 30.09.2024

Les conditions de vie des enfants et adolescents qui vivent à l’aide d’urgence dans le domaine de l’asile mettent en danger leur santé et leur développement. Cette situation n’est conforme ni à la Constitution fédérale ni au droit international. C’est ce que montrent deux nouvelles publications de la Commission fédérale des migrations CFM: l’étude du Marie Meierhofer Institut für das Kind (MMI) a recueilli pour la première fois dans toute la Suisse des données sur les conditions de vie des mineurs au bénéficie de l’aide d’urgence. L’avis de droit rédigé en complément par l’Université de Neuchâtel qualifie juridiquement les conclusions de l’étude. Pour la CFM, il est clair que des mesures sont nécessaires à tous les niveaux politiques. Les droits fondamentaux des enfants et des adolescents doivent être respectés – indépendamment de leur statut de séjour. Afin de préserver le bien-être et les droits des enfants et adolescents concernés, l’aide d’urgence dans le domaine de l’asile doit être réformée.

En Suisse, quelque 700 enfants et adolescents vivent dans des structures d’aide d’urgence, dont plus de la moitié depuis plus d’un an et un grand nombre depuis plus de quatre ans.

Pour réaliser l’étude indépendante «Enfants et adolescents à l’aide d’urgence dans le domaine de l’asile : Enquête systématique sur la situation en Suisse», le Marie Meierhofer Institut für das Kind (MMI), a collecté, pour la première fois, dans toute la Suisse, des données sur les conditions de vie des mineurs hébergés dans des structures d’aide d’urgence, sur mandat de la Commission fédérale des migrations CFM. Malgré des différences parfois considérables d’un canton à l’autre, le constat est clair: les enfants et les adolescents concernés sont menacés dans leur santé, leur développement et leur bien-être.

Les structures d’aide d’urgence affectent gravement la santé mentale

Il ressort de la nouvelle étude que les troubles psychiques des enfants et adolescents concernés sont très préoccupants, en particulier chez ceux hébergés dans des logements collectifs où ils sont exposés à des événements traumatisants, comme des actes de violence, des suicides et des expulsions forcées. Ils habitent pour certains dans des hébergements collectifs, loin de tout, avec une seule chambre pour toute la famille et aucun endroit où se retirer. De plus, ils sont souvent scolarisés séparément, ce qui complique encore les contacts sociaux. L’isolement social, le manque de perspectives et l’impuissance nuisent à leur développement psychosocial et à leur santé mentale.

Étude : Il est urgent de changer les conditions de vie

L’étude du Marie Meierhofer Institut für das Kind (MMI) montre qu’il est urgent d’agir, eu égard aux effets négatifs sur les enfants et les adolescents, et propose des adaptations aussi nombreuses que substantielles pour une meilleure protection des enfants à l’aide d’urgence:

  • Éviter que des enfants et adolescents ne vivent à l’aide d’urgence sur une longue durée (plus d’un an)
  • Améliorer les conditions de vie en cas de perception de longue durée
  • Assurer la participation sociale
  • Attribuer aux familles des logements adaptés, avec des endroits permettant aux enfants et adolescents de se retirer et d’étudier
  • Permettre un soutien ciblé
  • Éviter la sous-stimulation des enfants en âge préscolaire
  • Améliorer l’accès à l’école et à la formation professionnelle
  • Faciliter l’accès aux soins médicaux
  • Assurer l’accès aux offres d’accompagnement psychologique
  • Développer des programmes et concepts adaptés de soutien psychologique
  • Donner accès à des activités de loisirs
  • Définir clairement les compétences et procédures pour la gestion des situations de mises en danger
  • Définir des standards uniformes et contraignants et contrôler régulièrement leur respect

Avis de droit : Un changement de paradigme juridique s’impose

La faculté de droit de l’Université de Neuchâtel a effectué, sur mandat de la CFM, l’analyse juridique «Le régime d’aide d’urgence et les droits de l’enfant. Avis de droit et étude de conformité à la lumière de la Constitution fédérale suisse et de la Convention relative aux droits de l’enfant». Elle qualifie juridiquement les conclusions et recommandations de l’étude du Marie Meierhofer Institut für das Kind et dresse le constat suivant:

Les conditions de vie des enfants concernés ne sont conformes ni à la Constitution fédérale suisse, ni à la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant. Le développement physique, mental et social ainsi que la santé des enfants sont insuffisamment protégés.

La garantie des droits fondamentaux des enfants et adolescents suppose en outre une meilleure prise en compte des besoins spécifiques liés à l’âge. Les enfants ont des besoins qui vont au-delà de ce qui est nécessaire à leur simple survie biologique. Ainsi, ils doivent pouvoir participer à la vie sociale, se reposer et avoir des activités de loisirs. Il est également essentiel pour leur bien-être qu’ils puissent mener une vie quotidienne «normale».

Pour garantir les droits de l’enfant, le rapport souligne la nécessité d’un changement de paradigme : les autorités doivent placer le bien-être et les intérêts de l’enfant au centre de toute décision relevant du domaine des migrations.

CFM : Modifier les lois et exploiter les marges de manœuvre

Le régime suisse de l’aide d’urgence a été délibérément conçu pour que les décisions d’asile négatives soient exécutées et pour pousser les personnes concernées à quitter le pays. Mais pour la Commission fédérale des migrations CFM, les deux études montrent clairement que les conditions de vie des enfants et adolescents à l’aide d’urgence sont injustifiables. Car, que les parents soient obligés ou non de quitter le pays, la Suisse est tenue de protéger les droits des enfants et adolescents qui vivent à l’intérieur de ses frontières territoriales.

La CFM considère qu’il est du devoir des acteurs politiques et des autorités d’améliorer de manière substantielle les conditions de vie des enfants et adolescents à l’aide d’urgence.

Elle estime en outre qu’il incombe à la Confédération de veiller à ce que le droit supérieur soit respecté dans le cadre de l’aide d’urgence et que la loi sur l’asile soit révisée de manière à garantir les droits de l’enfant.

Quant aux cantons et aux communes, ils sont conjointement responsables de la mise en œuvre concrète de l’aide d’urgence et donc de l’amélioration significative et tangible des conditions de vie.

Enfin, la CFM est d’avis que les grandes disparités entre cantons montrent que des marges de manœuvre existent et que des mesures efficaces sont d’ores et déjà envisageables, en particulier concernant des hébergements adaptés aux enfants, la protection de la santé et du développement de l’enfant, ainsi que pour son intégration sociale.

Les droits de l’enfant s’appliquent indépendamment du statut de séjour

«Les problèmes psychiques, le manque de perspectives et l’échec de l’intégration ont des conséquences néfastes non seulement pour les enfants, mais également pour la société», souligne Bettina Looser, directrice de la CFM. C’est pourquoi des mesures d’intégration adaptées aux enfants sont indispensables: « ll est dans l’intérêt des enfants et de la société dans son ensemble de préserver les capacités d’apprentissage, de travail, d’intégration et de retour des adolescents.»

Et Bettina Looser de conclure, au vu des deux études, que: «Les droits des enfants et adolescents doivent être respectés, quel que soit leur statut de séjour.»

20 ans d’aide d’urgence

Cette année, l’aide d’urgence a 20 ans. Le nouveau numéro de notre revue asile.ch propose un dossier spécial. Aperçu du sommaire:

  • La fabrique des «débouté·es de l’asile». À quel prix?
  • L’aide d’urgence au quotidien. Indigne, insupportable
  • Toujours à l’aide d’urgence, 20 ans après

La Commission fédérale des migrations ?

La Commission fédérale des migrations CFM est un comité d’experts qui conseille le Conseil fédéral sur les questions de politique migratoire. Elle traite de tous les aspects liés à la migration, ce qui inclut l’asile, l’intégration et leurs implications pour la société suisse de migration.