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Documentation

CEDH | La Grèce sanctionnée pour refoulement illégal vers la Turquie

La Cour européenne des droits de l’homme (CDEH) a condamné la Grèce à dédommager une ressortissante turque expulsée de son territoire au printemps 2019 sans lui donner la possibilité de déposer une demande d’asile. La Cour indique également dans un arrêt du 7 janvier 2025 qu’à l’époque des faits d’indices sérieux laissaient présumer qu’il existait une pratique systématique de refoulements par les autorités grecques depuis la région du fleuve Evros vers la Turquie.

Nous relayons le communiqué de presse de la CDEH au sujet de l’arrêt du 7 janvier 2025. Vous trouverez également ci-dessous un résumé de la situation.

Barrière frontalière couché (à gauche) et une tour de contrôle (à droite) dans la région d’Evros. Photo: Alberto Campi

Une ressortissante turque, condamnée en mars 2019 à une peine d’emprisonnement de six ans et trois mois pour appartenance à l’organisation désignée par les autorités turques « FETÖ/PDY » (une organisation considérée comme terroriste par les autorités turques) a gagné la Grèce en mai 2019 après avoir traversé le fleuve Évros, pour y déposer une demande d’asile. Arrêtée, elle est retenue dans un poste de gardes-frontières. En dépit de sa volonté de solliciter la protection internationale en tant que réfugiée, elle est refoulée dans son pays où elle est arrêtée.

En juin 2019, le Conseil grec pour les réfugiés a porté plainte au nom de la requérante contre son refoulement. La plainte a été cependant rejetée par le procureur compétent pour défaut de preuve.

La plaignante a alors saisi la CDEH en mars 2021 en se référant aux articles 2 (droit à la vie), 3 (interdiction des traitements inhumains ou dégradants), 5 (droit à la liberté et à la sûreté) et 13 (droit à un recours effectif) de la Convention. La requérante affirme avoir été privée illégalement de sa liberté et soutient que son renvoi en Turquie présentait un risque pour sa vie et qu’il constituait un traitement inhumain et dégradant. Enfin, elle ajoute de ne pas avoir disposé de possibilités de recours pour faire valoir ses griefs.

La Cour, dans son arrêt, conclut que la version des faits de la requérante est suffisamment convaincante et établie au-delà de tout doute raisonnable. Les juges indiquent que les autorités grecques ont ignoré sa demande de protection internationale, en violation des articles 3 et 13 de la Convention européennes des droits de l’homme.

En raison du grand nombre de sources pertinentes, de leur diversité et de leur concordance, la Cour affirme qu’elle dispose d’indices sérieux laissant présumer qu’il existait au moment des faits une pratique systématique de refoulements par les autorités grecques de ressortissants de pays tiers depuis la région d’Évros vers la Turquie. Et ceci en violation manifeste aussi bien du droit grec que du droit international.

Par ailleurs, la CDEH estime que l’ordre juridique national grec n’offrait pas de voie de recours à la ressortissante turque, comme le stipule l’article 13 de la Convention.

En définitive, même si la Cour relève que la requérante n’a pas fourni de preuves suffisantes pour démontrer que sa vie aurait été mise en danger lors de son renvoi en Turquie, elle condamne les autorités grecques à verser à la plaignante 20 000 euros pour dommage moral. A noter qu’un des sept juges s’est dissocié de la décision de la Cour.

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