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SOSF | Le Pacte européen sur la migration, la Suisse et le 1er août

Alors que le Parlement se prononcera à nouveau sur le Pacte européen sur la migration et l’asile lors de la session parlementaire d’automne, nous relayons l’opinion de Sophie Guignard – secrétaire politique de Solidarité sans frontières – publiée dans Le Temps, à l’occasion du 1er août. Elle y interroge le sens de la fête nationale suisse. Derrière les discours officiels vantant liberté, solidarité et ouverture, elle dénonce l’écart croissant entre ces valeurs proclamées et la réalité politique, en particulier la reprise par le Parlement du nouveau pacte européen sur l’asile, qualifié d’« abomination ». Une réflexion critique sur ce que la Suisse choisit réellement de célébrer.

Nous relayons cet article avec l’aimable autorisation de l’auteure. L’article est aussi directement disponible en français sur le site du Temps et en allemand sur le site de Solidarités sans frontières.

OPINION | 1er août : fièr·exs de quoi?

Kristian Lovstad, sous licence unsplash

Lampions, discours, cantines avec nappes raiffeisen et feux d’artifices, partout aujourd’hui, une grande fête. Mais que célébrons nous exactement ? À en croire le discours officiel, tel que prononcé par les président·es de la Confédération lors des allocutions du 1er août des dernières années, tous partis gouvernementaux confondus.[1]Les textes des différentes allocutions peuvent être consultés ici

Un pays qui « réfléchit », promeut « l’indépendance, la sécurité, la liberté et l’autodétermination » (Ueli Maurer, UDC, 2019), qui « agit avec ses voisins » (Simonetta Sommaruga, PS, 2020) et envisage les défis actuels avec humilité, en prenant de la hauteur, en ajoutant notre engagement civique individuel et la créativité que stimule la démocratie directe (Guy Parmelin, UDC, 2021). Une Suisse, encore, qui est  fière «d’avoir ouvert ses portes et son cœur à [des milliers] de personnes en détresse » (Ignazio Cassis, PLR, 2022). Une Suisse « en mouvement » (Alain Berset, PS, 2023), et dont les personnes qui l’habitent « en tant que société et pays, relève[nt] les défis avec courage et détermination, afin de renforcer les fondements sur lesquels reposent la Suisse » (Viola Amherd, le Centre, 2024). 

Il serait tentant de croire que nous vivons réellement dans ce pays-là. Mais l’augmentation et la normalisation des discours racistes, ainsi que les attaques répétées contre le droit international perpétrées au Parlement ces dernières années, dont le débat sur la reprise du pacte européen sur l’asile, le 19 juin dernier, était sans doute le point d’orgue, montrent que nous sommes bien loin de ces belles paroles. Ce pacte cimente la réforme du régime d’asile européen commun (RAEC) qui marque un recul grave du droit d’asile. Il n’a rencontré que trop peu d’opposition.

Sommes-nous une Suisse de papier, qui étale ses valeurs uniquement pour la galerie ?

Où est la réflexion, où est l’importance apportée à la sécurité, quand les inégalités sociales et de droit, qui sont les causes premières de l’insécurité, sont exacerbées par la proposition du Conseil fédéral de ne reprendre que les éléments les plus restrictifs du pacte sur l’asile de l’UE ?

Où sont le courage et l’(auto)détermination quand la majorité du Parlement, gauche et droite confondues, accepte d’entrer en matière sur un projet de reprise du droit européen sur l’asile sans y apporter des contre-mesures fortes et efficaces qui permettraient, entre autres, d’améliorer le statut des réfugiés de guerre ? 

Où est la prise de hauteur quand des membres du Parlement qualifient de criminelles des personnes qui sont contraintes de franchir les frontières de manière illégalisée pour sauver leur vie alors que la plupart des voies d’entrée sûres ont été abolies ? 

Où sont les bonnes relations avec les voisins européens quand on accepte un pacte qui renforce la relégation de la plus grande part de l’accueil aux pays des frontières extérieures, qui sont les plus pauvres de l’Union, en refusant même d’en prendre en charge une infime partie par le mécanisme de solidarité ? 

Où est la célébration du mouvement, quand le Parlement accepte que les personnes venant demander l’asile soient de facto détenues dans des camps gigantesques et hostiles aux frontières de l’Europe ? 

Le projet de reprise du RAEC, proposé par le Conseil fédéral, est une abomination, unanimement condamnée par toutes les organisations de défense des droits des personnes réfugiées en Suisse. 

L’attitude du Parlement face au nouveau pacte européen sur l’asile et la migration est pleutre, elle représente un retour en arrière sur les droits fondamentaux et un grave mépris du droit international. Ne laissons pas les extrêmes droites (européennes et suisses) nous dicter notre politique migratoire. Il est hors de question que nous soyons un pays en guerre contre un ennemi qu’l s’invente. Revenons à nos fondements, le droit international, dont la Convention de Genève, la tradition humanitaire. Ne laissons pas la pire réforme du droit d’asile européen passer sans rien dire. 

Si nous tenons véritablement à l’État de droit, à la solidarité, et à l’idée que la force de la communauté se mesure au bien-être du plus faible de ses membres, (comme le dit le préambule de la Constitution fédérale), le projet actuel de reprise du RAEC doit être fermement combattu.

Sophie Guignard

1. August: Stolz worauf?

Laternen, Festbänke mit Raiffeisen-Tischdecken, Reden und Feuerwerke – heute wird überall in der Schweiz gefeiert. Aber was feiern wir eigentlich genau? Glaubt man den offiziellen Ansprachen[2]Die Texte der verschiedenen Ansprachen können hier eingesehen werden, die die Bundespräsidentinnen und Bundespräsidenten der letzten Jahre, unabhängig von ihrer Parteizugehörigkeit, am 1. August gehalten haben:

Ein Land, das «nachdenkt», «Unabhängigkeit, Sicherheit, Freiheit und Selbstbestimmung» fördert (Ueli Maurer, SVP, 2019), das «mit seinen Nachbarn zusammenarbeitet» (Simonetta Sommaruga, SP, 2020) und den aktuellen Herausforderungen mit Demut begegnet, indem es die Weite nutzt und unser individuelles bürgerschaftliches Engagement und die durch die direkte Demokratie geförderte Kreativität einbezieht (Guy Parmelin, SVP, 2021). Eine Schweiz, die stolz darauf ist, «ihre Türen und ihr Herz für [Tausende] Menschen in Not geöffnet zu haben» (Ignazio Cassis, FDP, 2022). Eine Schweiz «in Bewegung» (Alain Berset, SP, 2023), deren Einwohner «als Gesellschaft und Land die Herausforderungen mit Mut und Entschlossenheit angehen, um die Grundlagen, auf denen die Schweiz ruht, zu stärken» (Viola Amherd, Die Mitte, 2024).

Es wäre verlockend zu glauben, dass wir wirklich in einem solchen Land leben. Aber die Zunahme und Normalisierung rassistischer Äusserungen sowie die wiederholten Angriffe auf das Völkerrecht im Parlament in den letzten Jahren, deren Höhepunkt zweifellos die Debatte über die Übernahme des europäischen Asylpakts am 19. Juni dieses Jahres war, zeigen, dass wir von diesen schönen Worten weit entfernt sind. Der Pakt reformiert das Gemeinsame Europäische Asylsystem (GEAS) und stellt einen gravierenden Rückschritt im Asylrecht dar. Er stiess auf viel zu wenig Widerstand.

Sind wir eine Schweiz auf dem Papier, die ihre Werte nur für die Öffentlichkeit zur Schau stellt?

Wo bleibt die Reflexion, wo bleibt die Bedeutung, die der Sicherheit beigemessen wird, wenn soziale und rechtliche Ungleichheiten, die die Hauptursachen für Unsicherheit sind, durch den Vorschlag des Bundesrats, nur die restriktivsten Elemente des EU-Asylpakts zu übernehmen, noch verschärft werden?

Wo bleiben der Mut und die (Selbst-)Bestimmung, wenn die Mehrheit des Parlaments, links und rechts, bereit ist, auf einen Entwurf zur Übernahme des europäischen Asylrechts einzutreten, ohne starke und wirksame Gegenmassnahmen zu ergreifen, die unter anderem die Stellung von Kriegsflüchtlingen verbessern würden?

Wo bleibt die Überlegenheit, wenn Mitglieder des Parlaments Menschen als kriminell bezeichnen, die gezwungen sind, illegal Grenzen zu überschreiten, um ihr Leben zu retten, weil die meisten sicheren Einreisewege abgeschafft wurden?

Wo sind die guten Beziehungen zu den europäischen Nachbarn, wenn man einen Pakt akzeptiert, der die Abschottung gegenüber Flüchtlingen an den Aussengrenzen, in den ärmsten Ländern der Union, verstärkt und sich sogar weigert, einen winzigen Teil davon im Rahmen des Solidaritätsmechanismus aufzunehmen?

Wo bleibt die Würdigung der Bewegung, wenn das Parlament akzeptiert, dass Asylsuchende de facto in riesigen, feindseligen Lagern an den Grenzen Europas festgehalten werden?

Der vom Bundesrat vorgeschlagene Entwurf zur Übernahme der GEAS-Reform ist ein Skandal, der von allen Organisationen zur Verteidigung der Rechte von Flüchtlingen in der Schweiz einstimmig verurteilt wird.

Die Haltung des Parlaments gegenüber dem neuen europäischen Asyl- und Migrationspakt ist feige, sie bedeutet einen Rückschritt in Bezug auf die Grundrechte und eine schwere Missachtung des Völkerrechts. Wir dürfen nicht zulassen, dass die extreme Rechte (in Europa und in der Schweiz) unsere Migrationspolitik diktiert. Es kommt nicht in Frage, dass wir ein Land sind, das sich im Krieg mit einem selbst erfundenen Feind befindet. Kehren wir zu unseren Grundsätzen zurück, zum Völkerrecht, zur Genfer Konvention und zur humanitären Tradition. Wir dürfen die schlimmste Reform des europäischen Asylrechts nicht stillschweigend hinnehmen.

Wenn wir wirklich an Rechtsstaatlichkeit, Solidarität und der Idee festhalten, dass die Stärke einer Gemeinschaft am Wohlergehen ihres schwächsten Mitglieds gemessen wird (wie es in der Präambel der Bundesverfassung heisst), muss der aktuelle Entwurf zur Übernahme des Asylpakts entschieden bekämpft werden.

Sophie Guignard

Notes
Notes
1 Les textes des différentes allocutions peuvent être consultés ici
2 Die Texte der verschiedenen Ansprachen können hier eingesehen werden