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Notre regard

La Grèce, un État tiers « sûr » pour la Suisse?

Berne continue de vouloir renvoyer des personnes vers la Grèce

Photo: Mary Wenker

On a beaucoup parlé de la situation catastrophique dans les camps en Grèce, de celles et ceux qui attendaient des années avant de voir leur demande de protection examinée par Athènes. Les personnes qui y obtiennent une protection internationale (statut de réfugié ou protection subsidiaire) découvrent qu’on peut tomber plus bas. Dès leur statut obtenu de l’État grec, elles sont éjectées des camps et ne reçoivent plus aucune aide. Beaucoup tentent de survivre (voir Grèce | Chronique d’une détérioration annoncée), d’autres cherchent refuge ailleurs en Europe et certaines arrivent en Suisse.

Or en Suisse, elles se heurtent à un mur. Berne ne tient absolument pas compte de la dégradation de la situation sur place depuis l’arrivée au pouvoir en juillet 2019 du gouvernement conservateur et de ses durcissements législatifs. Le Secrétariat d’État aux migrations (SEM) et le Tribunal administratif fédéral (TAF) continuent de vouloir renvoyer en Grèce des personnes disposant d’un statut de protection sur la simple base que le pays est signataire de conventions des droits humains… Femmes enceintes, enfants, personnes malades, reçoivent du SEM une décision de «non entrée en matière État tiers sûrs» (NEM) avec renvoi (art. 31a al.1 let. a). Ils et elles disposent pour leur seule défense d’un «droit d’être entendu» contre cette décision et ne peuvent y présenter que très succinctement leurs arguments s’opposant à leur renvoi vers la Grèce. [1]Depuis juillet 2021, la procédure est en principe uniquement écrite.

Mais ceux-ci sont généralement balayés, quels que soient le dénuement prévisible, la situation familiale voire l’état de santé. Les représentations juridiques des centres fédéraux témoignent à cet égard d’une pratique extrêmement restrictive. Elles espèrent que le TAF, où de nombreux cas sont actuellement en suspens, rendra une jurisprudence prenant enfin la mesure de la situation dont témoignent de nombreux rapports d’ONG.

Sophie Malka

Pour rappel, les renvois Dublin vers la Grèce sont légalement interdits en raison des défaillances systémiques de l’État grec constatées par la Cour européenne des droits de l’homme depuis 2011 en matière de conditions de vie et les procédures d’asile. Dans ces cas Dublin Grèce, la Suisse est obligée d’appliquer la clause de souveraineté et d’entamer une procédure d’asile nationale.

NEM DUBLIN VS NEM ÉTAT TIERS SÛR ?

  • Une est une décision formelle de ne pas entrer en matière sur la demande d’asile.
  • Une décision est rendue si la personne a transité par un Etat membre de l’espace Dublin et que les autorités estiment qu’elle peut y être transférée pour l’examen de sa demande d’asile.
  • Une décision de est rendue aux personnes ayant séjourné et/ou obtenu une protection internationale dans un pays considéré comme sûr.

Dans les deux cas, la Suisse n’entend pas les personnes sur leurs motifs de fuite.

QUELQUES RÉFÉRENCES

OSAR, Facsheet Grèce et La Grèce en tant qu’État tiers sûr de 2021.

• RSA Refugee Support Aegean (RSA) et Stiftung PRO ASYL, Beneficiaries of international protection in Greece, Access to documents and socio- economic rights, mars 2021.

• AIDA, report 2020.

Notes
Notes
1 Depuis juillet 2021, la procédure est en principe uniquement écrite.