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Documentation

SOSF & DDR | Renvois Dublin vers la Croatie et le rôle de la Suisse

Début juin 2023, une délégation d’ONG suisses s’est rendue en Croatie pour documenter les conditions d’accueil effectives des personnes renvoyées dans ce pays depuis la Suisse en vertu des accords de Dublin. Son rapport pointe du doigt des déficits majeurs dans l’accueil, l’assistance médicale, la condition d’équité dans le procédure d’asile, le respect des droits de l’enfant et de la Convention des nations unies contre la torture. Fort de ce constat, le rapport démontre que la Suisse porte une responsabilité importante dans la dégradation de la santé mentale des personnes renvoyées vers ce pays. Les témoignages glaçants de ce qui a été subi en Croatie comme en Suisse et le constat de nombreuses et répétées violations des droits humains laissent sans voix. Si ça n’est d’exiger l’arrêt immédiat des renvois vers la Croatie.Le chapitre « Re-traumatisation par la Suisse » rend particulièrement patent combien la Suisse en refusant d’utiliser sa marge de manœuvre au sein du règlement Dublin se rend coupable de risques de péjoration de la santé des personnes. Avec 985 décisions de non-entrée en matière et 67 exécutions de ces transferts vers la Croatie (chiffres de juin 2023), la Suisse porte une responsabilité entière en renvoyant des personnes vulnérables vers ce pays dont les pratiques contreviennent aux Conventions internationales.

En plus d’être très dispendieux, les dispositifs mis en place pour procéder aux renvois forcés de femmes, hommes et enfants sont particulièrement choquant, comme en témoigne D. dans le rapport:

«Les policiers sont arrivés au milieu de la nuit. Ils nous ont sortis du lit. Nous étions sous le choc. Ils nous ont déshabillés complètement nus pour nous fouiller. J’ai perdu connaissance et ils m’ont menotté. Ensuite, ils nous ont emmenés à l’aéroport de Zurich. Là, ils nous ont déshabillés une deuxième fois et fouillés. J’ai de nouveau perdu connaissance. Les policiers m’ont emmenée dans un état de semi-conscience. Quelques jours plus tard, je devais être opérée, une opération que j’attendais depuis des mois. Pendant le vol, c’était l’horreur. J’avais tellement mal à l’oreille. Je de- vais tenir ma tête pendant tout le vol et presser mes mains sur mes oreilles. Nos enfants ne pouvaient pas s’asseoir à côté de nous. Mon mari était assis devant moi entre deux officiers de police et moi derrière lui entre deux femmes policières. Nos enfants étaient assis derrière nous, chacun à côté d’un officier de police.»

Le rapport se conclut en demandant à la Suisse de mettre fin à la « spirale de la violence » dont souffrent les personnes réfugiées qui sont battues et pourchassées en Croatie et ensuite « traitées comme des criminelles lors de leur renvoi de Suisse » vers un pays où elles ont déjà subi de mauvais traitements. Avec ce rapport qui rejoint les constats déjà dénoncés depuis plus d’une année, la Suisse ne pourra plus dire « qu’elle ne savait pas… »

Giada de Coulon, pour Vivre Ensemble-asile.ch

Retrouvez ci-dessous le rapport rédigé par Solidarité sans frontières et Droit de rester le 29 juin 2023. Il est également disponible en allemand sur le site de Solidarité sans frontières.

Au sujet du rapport, retrouvez l’interview de Sophie Guignard, secrétaire politique de SOSF dans le quotidien le Temps ( 29 juin 2023).

Parmi la bibliographie du rapport, retrouvez d’autres rapports récents sur la Croatie