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Notre regard

Appel d’elles | Continuer à unir nos forces

L’Appel d’elles a été lancé en Suisse romande à l’occasion de la journée internationale pour les droits des femmes, le 8 mars 2017. Initiée par 140 femmes soutenues par le Collectif R, la Marche mondiale des femmes et Viol secours, cette pétition a reçu l’appui de 50 autres organisations. Le 8 mars 2018, 8371 signatures ont été déposées à la Chancellerie fédérale. Depuis, le collectif Appel d’elles a entrepris diverses démarches. Dans sa première newsletter envoyée aux personnes signataires[1], il dénonce le peu de réactions des autorités fédérales, et surtout la poursuite des renvois de femmes et d’enfants très vulnérables dans des conditions intolérables. D’où sa volonté d’intensifier son travail d’information et d’élargir son réseau, notamment au travers de la mobilisation qui se construit pour la grève féministe du 14 juin.

Manifestation féministe du 8 mars 2019, Gustave Deghilage

Quelques rappels et nouveaux projets.

Le texte de l’Appel d’elles contenait trois objectifs : demander aux autorités fédérales de reconnaître comme motif d’asile les violences faites aux femmes tout au long de leurs parcours migratoires ; de leur assurer des soins appropriés aussi rapidement que possible ; et d’arrêter immédiatement leurs renvois vers l’Italie ou autre pays ne pouvant leur procurer une sécurité suffisante.

Grâce à une importante diffusion de témoignages (« action cartes postales »), l’Appel d’elles a rencontré un large écho dans la société civile et a soulevé beaucoup d’émotion.

En avril 2018, une brève entrevue a eu lieu entre une délégation de l’Appel d’elles et la Conseillère fédérale Simonetta Sommaruga, également en présence de Mario Gattiker, directeur du Secrétariat d’État aux migrations (SEM). Le résultat demeure très insatisfaisant, même s’il a été possible de transmettre quelques dossiers pour réexamen et d’insister sur la nécessité et l’urgence d’une formation continue et obligatoire pour le personnel du SEM chargé des auditions sur toutes les questions spécifiques au genre.

Avec l’ouverture de centres fédéraux et la mise en place des procédures accélérées, les personnes très fragilisées sont plus que jamais en danger. Or, le collectif Appel d’elles n’a toujours pas reçu la moindre garantie quant à l’instauration d’une telle formation, pourtant reconnue comme indispensable pour détecter une vulnérabilité liée au genre.

RESPECT DE LA CONVENTION D’ISTANBUL

Cette édition de la revue Vivre Ensemble propose une présentation de la Convention d’Istanbul, un nouvel accord international  visant à lutter contre les violences à l’égard des femmes. Les articles 59, 60 et 61 concernent directement les femmes migrantes et requérantes d’asile. Il en découle que, dans le cadre de l’application de la loi sur l’asile, de sérieuses mesures devront être prises pour parvenir à une meilleure détection de la vulnérabilité des femmes réfugiées et de leurs enfants, ainsi que pour leur assurer rapidement une protection et des soins adéquats. Précisément ce que demande l’Appel d’elles.

Lors de la rencontre avec la Conseillère fédérale Simonetta Sommaruga, le collectif n’a pas manqué de faire référence à cette Convention. Il prévoit aussi un travail d’information auprès du public, en collaboration avec différents réseaux. Son implication dans la grève du 14 juin en sera une première étape.

RENCONTRE EUROPÉENNE

À l’initiative de la Marche mondiale des femmes, un groupe s’est créé fin 2018 dans la perspective d’organiser une rencontre européenne « Femmes, Migration, Refuge » les 27, 28 et 29 septembre 2019 à Genève. Face à l’omniprésence des questions migratoires dans les agendas politiques et à la montée des forces conservatrices et xénophobes, il importe de trouver de nouvelles formes de résistance.

Ce groupe rassemble déjà plus de trente personnes, la plupart membres d’organisations en lien avec la migration et la défense des droits des femmes. Le collectif Appel d’elles en fait évidemment partie, d’autant qu’il s’est déjà fait connaître au-delà des frontières et que son action a rencontré un réel intérêt.

Cette rencontre européenne, qui donnera une place importante à la lutte contre les discriminations vécues par les migrantes et qui pointera les lacunes de la loi sur l’asile face aux questions de genre, s’inscrit dans le mouvement de grève féministe du 14 juin qu’elle prolongera.

Le but est de créer des liens avec des militantes d’autres pays européens, de connaître et d’échanger des expériences positives de résistance qui se passent ou se sont passées dans différents lieux. Et surtout d’impliquer les femmes migrantes elles-mêmes, dans la diversité de leurs situations et vécus, afin qu’elles puissent exprimer leurs besoins, participer activement à la construction d’un espace de réflexion et d’un réseau de lutte pour une meilleure protection et extension de leurs droits. Elles sont déjà plusieurs, originaires de différents pays et cultures, à s’engager dans les réunions de préparation.

Cette rencontre de septembre est ouverte à toute personne intéressée. Programme et informations pour l’inscription et le lieu seront communiqués sur le site de Vivre Ensemble.

DANIELLE OTHENIN-GIRARD

Membre du collectif Appel d’elles

[1]Parue sur le site d’Appel d’elles (www.appeldelles.ch ) et celui de Vivre Ensemble (www.asile.ch) dans l’article « Appel d’elles / Le collectif renforce son réseau »

La revue Vivre Ensemble d’avril 2019 (VE 172) propose un dossier spécial en lien avec la Grève des femmes du 14 juin 2019:

Éditorial | Trouver de nouvelles formes de résistance, par Sophie Malka

Appel d’Elles | Continuer à unir nos forces, par Danielle Othenin-Girard 

Convention d’Istanbul | Lutter contre les violences à l’égard des femmes, par Emmanuelle Hazan

Témoignage | Construire sa vie, malgré les obstacles et la bureaucratie, par Anouk Piraud

Analyse | Victime de traite des êtres humains. Si on se souciait des hommes? par Sibel Can-Uzun

Gestion de l’asile | ORS Fribourg: quand l’État fait la sourde oreille – Harcèlement: mesures proactives nécessaires, par Droit de rester Fribourg