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Préjugés

Les statistiques de l’aide d’urgence

1.5. Vivre à l’aide d’urgence

« Prévue au départ pour un court laps de temps, elle est accordée pour un mois, une semaine…un jour! La durée achevée, il faut chaque fois la renouveler. Imposant un contrôle administratif intense, l’aide d’urgence agit comme un instrument de contrainte afin d’inciter des départs ‘volontaires’ depuis la Suisse. Cette mesure est un échec. Si de nombreux célibataires ont rejoint la clandestinité, les personnes fragiles et les familles, refusant de partir, se résignent à vivre dans cette précarité. »

(Nicole Andreetta, « Aide d’urgence. Constats d’échec et cercle vicieux…!« , Vivre Ensemble, n°147, avril 2014)

Comme le souligne Christophe Tafelmacher, « l’exclusion de l’aide sociale commence par la notification d’une décision d’expulsion du logement, sous menace d’intervention de la force publique, et se poursuit par l’abandon de tout bien (meubles, électro-ménager, appareils hi-fi, télévision, etc.). Elle signifie une perte drastique des moyens pour vivre, et donc de l’autonomie individuelle » (Christophe Tafelmacher, « Droit à l’aide d’urgence, le grand retournement« , Plädoyer, n°3, 19.05.2009).

La relation de contrainte que l’aide d’urgence instaure entre les personnes et l’administration est mise en avant également par Karine Povlakic dans un texte qu’elle a rédigé pour la plateforme d’information humanrights.ch: « L’aide d’urgence n’est pas une aide découlant du droit au minimum vital, contrairement à ce qu’affirment les autorités. En raison de l’importance des interventions multiples et systématiques des autorités dans la vie privée des requérants d’asile, dans leur autonomie économique, leur domicile, leurs relations familiales et tous leurs choix de vie, la relation juridique dominante entre les personnes et l’administration est une relation de contrainte. L’aide d’urgence tend à humilier les personnes qui y sont soumises par la privation de toute forme d’autonomie personnelle. Elle les rabaisse à une dépendance de survie à l’égard de l’autorité. Les liens sociaux sont coupés faute de moyens et ainsi les personnes à l’aide d’urgence sont discriminées » (Karine Povlakic, « Aide d’urgence: un instrument de contrainte discriminatoire« , Plateforme d’information humanrights.ch, 09.05.2012).

Statistiques:

Retrouvez les principales statistiques sur l’aide d’urgence, en cliquant ici.

Témoignages:

comedia deshumanisation organisee

Les enfants à l’aide d’urgence

La vie des enfants à l’aide d’urgence se révèle très difficile. Les articles et témoignages ci-dessous apportent un éclaire sur ce qui signifie de vivre à l’aide d’urgence pour des enfants.

Samir, portrait d’un enfant débouté

Vivre sa vie d’enfant lorsque l’on est demandeur d’asile suppose une capacité d’adaptation et de résistance que l’entourage, et la société en général, ont tendance à minimiser, voire à nier. Philippe Klein, psychologue à Appartenances-Genève, rencontre dans le cadre de ses consultations ces jeunes êtres en construction, dont on peine à voir et à entendre les souffrances, les peurs, mais aussi la force et le courage. A partir de ces rencontres multiples, il a dressé un portrait imaginaire. Le choix de la fiction plutôt que de l’anonymat, pour protéger l’identité de ses patients. Un choix permettant de mieux faire ressortir les enjeux dans lesquels les enfants se trouvent entraînés (pour lire tout le témoignage cliquez ici)

En effet, comme l’a écrit Nicole Andreetta dans un article paru dans Vivre Ensemble n°139 (septembre 2012), « l’aide d’urgence, ça touche aussi les enfants« . La plateforme humanrights.ch a publié un article consacré aux enfants à l’aide d’urgence: « Enfants: comment vivent-ils lorsqu’ils n’ont que l’aide d’urgence? » (31.03.2014), dont nous vous présentons un résumé ci-dessous:

En Suisse, l’on compte de nombreux enfants parmi les bénéficiaires de l’aide d’urgence. La proportion des mineurs s’élève aujourd’hui à près de 15% et la tendance reste à la hausse. Certains sont arrivés en Suisse avec leurs parents, d’autres seuls. Mais tous ne vivent que sur la base de cette aide visant l’unique survie, loin d’une vie d’enfant normale et protégée.

[caption id="attachment_24788" align="alignright" width="212"]Rapport ODAE droits enfants Un chapitre du rapport de l’ODAE « Droits de l’enfant et application des lois suisses sur les migrants » est dédié aux enfants et aux jeunes à l’aide d’urgence (p.16 et segg.)[/caption]

L’ODAE romand (voir « Les enfants ont des droits » et »Droit de l’enfant et application des lois suisses sur les migrants« ) et le CSDH ont tous deux montré de façon convaincante que l’aide d’urgence garantit un minimum vital absolu totalement inadapté aux enfants. Dès l’instant où des mineur-e-s doivent vivre sous ce régime pendant une longue période, la Suisse accepte les graves dommages que cette vie leur fait subir. Le système discrimine ces enfants de façon intentionnelle, afin de pousser leurs familles à un départ aussi rapide que possible. Les enfants sont les victimes de la pression que les autorités veulent exercer sur les parents. A travers les premiers, ce sont les seconds qui sont visés, sans considération pour leur jeunesse, leur vulnérabilité et leur innocence. Car l’on oublie trop souvent que ces mineur-e-s ont rarement choisi eux-mêmes de venir, mais suivent, comme partout, les décisions de vie prises par leurs parents.

Les femmes à l’aide d’urgence

La vie des femmes à l’aide d’urgence se révèle très difficile. L’article ci-dessous en explique certaines implications:

« Les femmes qui sont soumises au régime de l’aide d’urgence sont une petite minorité, car beaucoup moins de femmes arrivent jusqu’en Suisse en tant que requérantes d’asile. Pour elles, et éventuellement pour leurs enfants, le système est d’autant plus avilissant.

L’infrastructure et les conditions de vie dans les centres d’aide d’urgence majoritairement habités par des hommes sont rarement bien adaptées aux besoins des femmes, notamment en ce qui concerne la sécurité, la santé, l’hygiène ou le soin des enfants. Certes, la loi prévoit que ‘les personnes particulièrement vulnérables’ soient traitées différemment, mais (…) la situation est très différente d’un canton à l’autre et d’un centre d’hébergement à un autre.

Par exemple, il n’y a pas toujours de toilettes, des pièces d’eau ou des douches séparées par sexe. L’intimité et la sécurité des femmes ne sont pas souvent garanties. Ces conditions encouragent la criminalité, les harcèlements ou les violences sexuelles. Le budget des bénéficiaires de l’aide d’urgence est la plupart du temps alloué sans distinction aucune entre hommes et femmes. Dès lors, les produits  tels que les articles d’hygiène, les contraceptifs ou la nourriture pour bébés ne sont pas compris comme de suppléments nécessaires aux femmes. Les femmes sont ainsi souvent dépendantes du bon vouloir des responsables ou de tiers pour obtenir de tels produits. Ou par le biais de revenus illégalement gagnés. La situation des femmes seules avec enfants est tout particulièrement indigne, lorsque, par exemple, les centres d’hébergements sont fermés la journée et qu’elles doivent passer la journée dans la rue » (source: Amnesty International, « Survivre avec l’aide d’urgence quand on est une femme« , 19 janvier 2011)

Pour en savoir plus: quelques références bibliographiques

Povlakic suppression aide sociale