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Préjugés

Oisiveté? Accès au marché de l’emploi

Témoignages

Vivre Ensemble relaie régulièrement, via sa revue, des témoignages de personnes relevant du domaine de l’asile qui racontent leurs difficultés de s’intégrer dans le marché du travail suisse. Nous vous proposons quelques extraits ci-dessous.

« En tant que réfugié, c’est d’autant plus difficile de suivre les cours en ligne que je ne vois personne. Je n’ai pas de famille ici. Quand tout est fermé, je ne sors pas. Je ne sais pas vers qui me tourner pour m’aider. Mon assistant social ne peut rien faire, je ne connais pas beaucoup d’associations qui peuvent m’apporter du soutien… »

Le numéro 182 /avril 2021 de la revue Vivre Ensemble propose les témoignages de Eren, Reza et Ali, tous étudiants réfugiés en temps de COVID-19. Ci-dessous une vidéo réalisée par Julien Norberg pour Vivre Ensemble.
COVID-19: étudiant·es réfugié·es et enseignement à distance
Vidéo réalisée par Julien Norberg pour Vivre Ensemble

Je m’appelle Rania. J’ai 35 ans. Je suis Érythréenne, mais je suis née et j’ai étudié au Soudan. Après j’ai travaillé à Dubaï. Je vis depuis 4 ans en Suisse. J’ai un permis F humanitaire. […] En janvier 2020, je cherchais du travail et j’étais inscrite au cours « langue et santé » de la Croix Rouge. […] Le 19 juin j’ai trouvé un travail, je l’ai trouvé seule par une annonce sur internet. C’est un poste d’aide cuisinière à l’hôpital. […] Je suis engagée jusqu’à fin août et j’espère pouvoir rester après. La situation pour moi est donc mieux après le coronavirus qu’en janvier. Avant pour moi tout était fermé : cours, non, école, non, travail, non. Mais maintenant ça va. Ça fait plusieurs années que je cherche du travail. J’ai cherché déjà à travailler en crèche avec le permis N (requérante d’asile) mais ils ont dit c’est pas possible. Avec le permis F j’ai eu des stages mais pas de travail et pas de formation professionnelle. […] Ce que j’aimerais dire d’important, c’est qu’il faut changer le permis F : c’est difficile de trouver un travail, c’est difficile de voyager, c’est difficile pour tout. C’est comme être dans une prison. Tu ne peux pas sortir, tu ne peux pas voir ta famille. Ça je ne comprends pas. Il faut supprimer les permis F ou changer les conditions pour pouvoir travailler et voyager.

Témoignage de Rania, « Avoir un permis F, c’est comme être dans un prison », publié dans Vivre Ensemble, n° 180, décembre 2020.

« En 2010, avec l’aide du Centre social protestant de Genève (CSP), nous avons demandé un financement au forfait intégration et j’ai pu suivre une formation d’aide-comptable à l’Ifage. J’ai obtenu un diplôme en décembre 2010. Munie de mon diplôme suisse, j’ai recommencé mes recherches d’emploi : chez Contaplus, Adecco, Manpower, … Tous me répondaient que les employeurs ne souhaitent pas engager des personnes titulaires d’un « permis F » en raison des démarches et papiers à remplir. Je me heurtais aussi à un obstacle de taille : mon manque d’expérience sur sol helvétique. (…) J’ai remarqué que beaucoup d’entreprises, même parapubliques, ignorent l’existence du permis F. Dans la rubrique offres d’emploi, où ils demandent des permis valables, le permis F n’est jamais mentionné explicitement. Certains employeurs demandent si une personne avec un permis F peut travailler sur le sol suisse. Et je comprends leurs inquiétudes : le permis F est qualifié d’admission provisoire. Qui aimerait investir pour une personne censée être en Suisse provisoirement ? Pourtant, le permis F est un permis comme tant d’autres, notamment le B, qui sont renouvelables chaque année ».

Témoignage de Marie-Goretti Nduwimana, « Le casse-tête des permis F », publié dans Vivre Ensemble, n° 143, juin 2013.

« Mon mari est psychiatre. Nous venons d’un milieu aisé. Nous avons tous deux étudié dans un lycée international d’Istanbul. Mon mari s’est engagé pour la cause kurde. Pour cette raison, il a dû quitter la Turquie et demander l’asile en Suisse. Nous avons d’abord vécu à Lausanne, puis à Genève. En 2008, lorsque nous avons obtenu le permis F, nous avons d’abord été soulagés. Après plusieurs d’années d’incertitude, notre vie allait se stabiliser et mon mari pourrait (enfin !) chercher du travail dans sa profession. Nous étions bien décidés à devenir indépendants et nous souhaitions nous intégrer dans la société qui nous avait accueillis. ‘Maintenant tout sera plus facile !’ pensions-nous. En réalité, ce fut très compliqué. Que d’obstacles administratifs et de contradictions avons-nous rencontrés ! Nous aurions davantage eu besoin de conseils et d’encouragements ».

Témoignage de Leyla, « S’intégrer ? Un parcours du combattant ! », publié dans Vivre Ensemble, n° 138, juin 2012.

Le point de vue d’une assistante sociale :

« De toute évidence, l’apprentissage de la langue est une priorité et doit débuter le plus rapidement possible. Des cours intensifs, adaptés à la situation de la personne et complétés par une immersion dans la société, permettent de rapides progrès. Pourtant, les entraves sont nombreuses sur ce chemin, les désillusions et les découragements aussi. C’est de fait un véritable parcours du combattant qui débute, parcours où la personne migrante se sent souvent seule et démunie lorsque ce qui lui est proposé ne correspond pas à ses besoins, à sa réalité du moment ».

Lucine Miserez Bouleau, « S’intégrer : question de volonté ? », Vivre Ensemble, n° 149, septembre 2014.